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Lettre de la FNAUT au Président de la République

25 Mai 2020

Par un vote unanime, l’Assemblée Générale 2020 de la FNAUT demande au Président de la République des mesures de soutien à la SNCF et un ambitieux plan de relance « Rail – Climat » pour les voyageurs et les marchandises.

 

 

Monsieur le Président,

Quelques jours après le début de la phase de déconfinement, les questions de mobilité sont au cœur de toutes les préoccupations et exigent des réponses nouvelles.

Vous allez, par ailleurs, préciser très prochainement votre politique face au réchauffement climatique, suite aux travaux de la Convention citoyenne pour le climat. Permettez-nous d’avancer quelques propositions relatives au secteur de la mobilité à courte, moyenne et longue distance, et plus particulièrement au secteur ferroviaire.

 

Trois crises ont affaibli le transport public ces derniers mois

La crise des gilets jaunes a débouché sur un renforcement de la dépendance automobile. La régression du maillage du réseau ferré se poursuit, les « petites lignes » disparaissant peu à peu, au coup par coup, sans étude d’impact sur le fonctionnement de l’ensemble du réseau et sur l’aménagement du territoire. Les travaux en cours entre l’Etat et les Régions suite au rapport Philizot sont pour nous de première importance.

 Le mouvement social contre la réforme des retraites a lourdement pénalisé les usagers des services publics urbains, régionaux et des liaisons Intercités. Il a montré l’importance du transport de masse représenté par le ferroviaire et les transports publics. Si covoiturage et autocar sont certes à développer, ils ne restent cependant que des solutions complémentaires. Le blocage des trains de fret pousse par ailleurs les chargeurs à se tourner durablement vers la route.

La crise sanitaire rebat les cartes à court terme. Les transports publics, transport de masse et transport du quotidien, mais aussi transport intercités de plus de 100 km, transport capillaire d’irrigation du territoire sont remis en cause dans leurs fondements : sécurité et modèle économique.

A moyen terme, le report vers le « tout voiture », encouragé par la peur du Covid-19 et un prix de l’essence très bas n’est pas une solution. Les embouteillages à venir, outre les coûts de congestion, contredisent la reprise économique, le retour des villes polluées signe celui des maladies pulmonaires (sources de dépenses de plusieurs dizaines de milliards d’euros) pour tous mais d’abord et surtout pour les enfants et les personnes âgées.

Le moment est venu de questionner à nouveau la thématique de la mobilité pour répondre aux enjeux sanitaires  liés au changement climatique.

 

Le train, mode de transport le plus écologique, doit être l’épine dorsale des mobilités au plan local et national.Un plan de relance ferroviaire est indispensable pour sauver la SNCF, tenir compte de la distanciation physique, répondre au changement climatique et réduire la dépendance automobile.

Indépendamment de ses atouts techniques, le train est le mode de transport le plus respectueux de l’environnement : économe en espace et en énergie, il est le moins émetteur de gaz à effet de serre (GES). Le rail doit donc former l’ossature du transport urbain, régional et interurbain, et du transport du fret.

La SNCF, qui va accumuler 3 milliards de déficit mérite tout autant d’être sauvée que le secteur aérien ou le secteur automobile. Certes le gouvernement a repris une partie de la dette et accru l’investissement de régénération du réseau mais l’effort reste insuffisant car il faut rattraper un important retard d’investissements.

Le respect de la distanciation physique que l’on peut espérer « temporaire » nécessite dans un premier temps de fairecirculer davantage de trains et d’accroître les fréquences.

Mais en réalité, il s’agit d’une question de fond permanente car les comparaisons européennes montrent que le réseau français reste sous-utilisé, y compris sur certains grands axes, voyageurs ou fret. Le réseau ferré peut supporter davantage de circulations dans des conditions qui favorisent fiabilité et ponctualité. Des investissements massifs sont nécessaires. L’ART en avait souligné l’insuffisance. Les usagers refusent cette austérité ferroviaire qui pénalise leur quotidien et qui nuit au fret pour lequel les lignes capillaires, lignes nouvelles  (accès au Tunnel Lyon-Turin, Bordeaux – Toulouse essentiel pour un report modal de l’avion, Montpellier – Perpignan) sont indispensables à l’évolution de son activité.

Un investissement massif est d’autant plus nécessaire que le réseau (en particulier les lignes de montagne et les lignes littorales) est de plus en plus fragilisé par les impacts du réchauffement climatique – canicules, glissements de terrain, inondations, montée des océans – et que son maillage a fortement régressé.

 

 Le transport ferroviaire doit être fiable, facile à utiliser et bon marché.

Il nous semble donc indispensable :

– d’assurer une stricte indépendance de SNCF Réseau pour la gestion des capacités et des horaires ; de garantir la circulation des trains des entreprises ferroviaires non grévistes en cas de grève à la SNCF (l’enjeu est essentiel pour le transport du fret) ;

– d’adapter le niveau des péages à la capacité contributive des trafics ;

– de réduire le taux de la TVA sur le transport public urbain et ferroviaire à 5,5% ;

– d’établir une équité fiscale entre les différents modes de transport et de limiter les aides publiques aux concurrents du rail (aéroports, compagnies aériennes, transporteurs routiers), les coûts externes devant être peu à peu internalisés dans la tarification des différents modes de transport ;

– d’accélérer l’introduction de la concurrence entre opérateurs ferroviaires ;

– de coordonner efficacement le rail et les autres modes, en particulier l’autocar ;

– enfin d’arrêter la construction d’infrastructures routières, directement concurrentes de lignes ferroviaires (327 km d’autoroutes ont été lancés en 2019, l’équivalent de la ligne à grande vitesse Tours – Bordeaux), et les agrandissements d’aéroports (Roissy, Nice, Nantes) qui ne pourront que faciliter la croissance du trafic aérien.

 

L’exemple de nos voisins européens est à suivre : investissements massifs, cadencement.

La politique que nous proposons n’a rien d’utopique, elle est largement mise en œuvre chez nos voisins européens, en Allemagne en particulier (investissement de 8,6 milliards par an sur le réseau ferré, réouverture de 1200 km de petites lignes, baisse du taux de TVA de 19% à 7%), et va dans le sens du « Green Deal » proposé par la Commission européenne. Celle-ci veut faire de 2021 l’année européenne du rail, ne ratons pas cette occasion de mettre la France au niveau de ses voisins.

 

La FNAUT vous invite à une politique volontariste pour enrayer la croissance des trafics routiers et aériens,   réduire la dépendance automobile, et à voir loin, à 20 ans, pour éviter une catastrophe écologique et préparer un avenir vivable. Elle vous demande, en conséquence de donner la priorité au transport ferroviaire, d’inscrire la France dans le projet 2021 et d’en transcrire les objectifs dans notre pays.

 

Nous vous prions de croire, Monsieur le Président, à notre très haute considération.

 

Bruno Gazeau
Président de la FNAUT

 

 

Lettre de la FNAUT au Président de la République (avec annexes)

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