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Droits des voyageurs ferroviaires en Europe : insuffisant pour la FNAUT

13 Oct 2020

La refonte du règlement européen 1371/2007 sur les droits des voyageurs ferroviaires risque d’exclure une majorité d’usagers des dispositions du futur règlement.

 

1/ La refonte du règlement européen 1371/2007 relatif aux droits des voyageurs ferroviaires est en cours auprès des instances européennes depuis 2018. L’objectif poursuivi est de garantir aux personnes qui utilisent le chemin de fer qu’elles seront prises en charge, remboursées ou dédommagées en cas de dysfonctionnement perturbant leur déplacement. Le règlement, adopté en 2007 et transposé en droit français, nécessite une révision pour en compléter et renforcer les dispositions.

 

2/ A ce jour, l’état du texte est le suivant :

  • Les États membres de l’Union européenne peuvent exclure leurs lignes intérieures de la sphère d’application du règlement ;
  • De même, les voyageurs utilisant les services conventionnés – en France, les TER, les TET et le Transilien – ne sont pas couverts par le règlement ;
  • Les voyageurs disposant de billets pour des trajets impliquant plusieurs opérateurs pour un même trajet ne sont pas couverts si le retard de l’un compromet la correspondance avec l’autre compagnie. Cette question concerne les trajets internationaux (ex : TGV + Thalys) et va se renforcer lorsque plusieurs opérateurs existeront dans un même pays (ce qui est déjà le cas dans plusieurs États de l’Union européenne).

 

3/ La révision en cours du règlement ne satisfait pas pour le moment les revendications de la Fédération Européenne des Voyageurs (FEV) et de la FNAUT si l’on en juge par l’accord provisoire intervenu le 1er octobre dernier entre le Parlement européen, la Commission européenne et le Conseil des ministres européen des transports.

Ainsi :

  • Les services nationaux, ainsi que les réseaux conventionnés soumis à des obligations de service public restent exclus du règlement si les États membres le souhaitent ; il faut rappeler qu’en Europe, sur 10 voyageurs qui prennent le train, 9 utilisent un service public conventionné ;
  • Les billets pour un trajet impliquant plusieurs opérateurs seraient couverts à la condition que ce soit la même entreprise ou une de ses filiales qui assure le voyage de bout en bout ; ce cas risque de rester rarissime, à fortiori pour un trajet international ;
  • La notion de force majeure serait introduite, qui permettrait à l’entreprise ferroviaire de s’exonérer de sa responsabilité envers les voyageurs en cas de conditions météorologiques extrêmes, catastrophe naturelle majeure ou de crise sanitaire ; il est à prévoir qu’une grande incertitude va régner en cas de difficultés et qu’en résultera une insécurité pour les voyageurs, peu génératrice d’attractivité au bénéfice du train ;
  • Pour le transport des vélos, le compromis exige que les entreprises doivent prévoir un nombre adéquat d’emplacements pour le matériel neuf ou modernisé, ce qui laisse une latitude totale aux entreprises ferroviaires pour définir le nombre d’emplacements ;
  • Le délai de prévenance de 48 h imposé aux personnes à mobilité réduite pour signaler leur déplacement devrait passer à 36h puis à 24h en 2026 ; la longueur de cette transition parait difficilement explicable.

Tout cela est loin d’être satisfaisant et les droits des voyageurs ferroviaires ne sortent pas renforcés de cette procédure, en tous cas pour le moment.

 

4/ La FNAUT rappelle que dans le cadre de la première lecture sur la proposition de règlement au Parlement européen en mars 2018, elle avait proposé deux amendements :

  • l’extension du champ du règlement aux services ferroviaires suburbains et régionaux,
  • l’amélioration des dédommagements en cas de retard par une diminution du seuil de déclenchement de l’indemnisation qui passerait d’une heure de retard à 30 minutes et une amélioration du montant du dédommagement qui atteindrait 100 % de la valeur du billet à partir de 2 heures de retard.

Ces deux demandes n’ont pas été prises en compte.

Prenant en compte les pratiques de certaines entreprises ferroviaires à l’occasion de la pandémie de Covid-19, la FNAUT demande que le futur règlement institue un droit à remboursement en euros des trajets annulés et non sous forme d’avoirs imposés par l’entreprise ferroviaire. C’est ce que prévoit le règlement sur les droits des passagers aériens et qui devrait au moins s’appliquer pour les services ferroviaires non conventionnés.

 

5/ Le texte va poursuivre son parcours législatif, mais il faut craindre que le poids du Conseil des ministres, qui représente les États membres de l’Union – et protège les intérêts de leurs compagnies ressortissantes – continue de prévaloir, et que l’intérêt des entreprises ferroviaires reste prépondérant au détriment de la protection des voyageurs.

 

6/ Selon le souhait de la Commission européenne, 2021 doit être « l’Année du rail » et par ailleurs, toute la politique de l’Union poursuit avec le programme du « Pacte Vert », l’objectif d’une Europe neutre en carbone en 2050. Il faut craindre que cette ambition soit difficile à atteindre si le transport ferroviaire ne réussit pas à attirer de nouveaux voyageurs et en particulier ceux qui pour le moment utilisent leur voiture, l’autocar ou l’avion pour leurs déplacements. Séduire de nouveaux clients suppose que ceux-ci bénéficient de droits robustes et clairement affirmés qui garantissent leur prise en compte lors de dysfonctionnements du système ferroviaire. On en est loin, en l’état attendu du projet de refonte du règlement européen 1371/2007.

 

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