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Autopartage(s): un autre modèle est possible

29 Juin 2018

Tribune publiée dans Mobilettre par Jean-Baptiste Schmider, PDG du réseau Citiz et Bruno Gazeau, Président de la FNAUT.

L’annonce de la fin d’Autolib pose légitimement la question du modèle économique de l’autopartage, de sa pertinence et de sa pérennité. Pour autant, tous les modèles d’autopartage n’ont pas le même modèle économique, ni les mêmes vertus environnementales et il nous semble nécessaire de les clarifier.

Efficience du service et appropriation par l’usager

Concentrons-nous sur l’essentiel : l’usager, la qualité du service qui lui est rendue et la contribution positive du service au bien vivre dans nos villes. La vraie question est celle de l’efficience, c’est-à-dire l’impact des contributions positives rendues à la collectivité au regard du financement demandé.

Avec Mobility en Suisse, Communauto au Canada, Cambio ou Stadtmobil en Allemagne, l’autopartage existe depuis maintenant trente ans en Europe et en Amérique du Nord. Initié par Citiz depuis près de vingt ans en France, il a trouvé un modèle économique équilibré et pérenne pour offrir une alternative à la voiture particulière, et permettre aux habitants de se démotoriser (à savoir de se débarrasser de leur voiture particulière, leur second véhicule, voire même leur premier véhicule en zone urbaine). Le rôle de ces « pure players » de l’autopartage (c’est-à-dire des entreprises dont c’est la seule activité et qui sont indépendantes) montre qu’il existe un modèle économique rentable. Parfois, comme Mobility en Suisse ou Citiz en France, ces entreprises sont même des coopératives issues de l’économie sociale et solidaire et dédiées à l’autopartage. Elles appartiennent principalement à leurs clients ou se sont développées en multi-sociétariat, avec des partenaires locaux, notamment les collectivités. Ces sociétés sont non revendables et non délocalisables, et développent donc leur service et l’emploi sur le territoire.

L’autopartage, outil complémentaire de la mobilité collective

Ces sociétés se sont développées principalement autour de l’autopartage en boucle – qui propose l’emprunt et la remise d’une voiture sur un même emplacement réservé ou « station », permet l’anticipation et garantit la réservation. Ce service s’intègre davantage au système de mobilité qu’il vient compléter et enrichir. En effet, il est utilisé pour des trajets périurbains (la réservation moyenne est d’une ½ journée et environ 50 kms) en complémentarité avec la marche à pied, le vélo et les transports en commun pour les déplacements en ville. Il conduit à la démotorisation et à un changement des comportements de mobilité permis par le passage de la propriété à l’usage. C’est un service qui est donc bon à la fois pour le portefeuille et la santé, ainsi que pour l’espace public et la planète.

Autre avantage, l’autopartage en boucle permet un gain d’espace public très important puisqu’une voiture partagée remplace dix voitures particulières et fait gagner neuf places de stationnement, comme le rappelle une étude 6t-Ademe de 2016.

De son côté, l’autopartage dit « en free floating » est un fort vecteur d’image, nécessaire mais pas suffisant. En effet, ce système très en vogue qui permet de prendre et redéposer la voiture n’importe où sur une place en voirie dans un périmètre donné ne conduit pas autant à la démotorisation, et à une moindre complémentarité des modes. En revanche, il permet un déploiement plus rapide, par sa facilité d’usage.

Quel modèle d’avenir ?

Il ne s’agit pas d’opposer les deux services mais de rappeler aux collectivités que l’autopartage en boucle a toute sa place dans le bouquet de mobilité à côté du free floating. C’est d’ailleurs ce que propose Citiz, qui a développé des offres d’autopartage en free floating dans cinq villes de France, sous la marque «Yea!», en complément des offres en boucle.

Pour l’autopartage comme pour toutes les nouvelles mobilités, il n’existe pas de modèle d’organisation universel, ni d’acteur unique, susceptible de faire émerger les nouvelles mobilités en évitant l’anarchie. Le modèle devra être adapté en fonction du territoire et de son potentiel, ainsi que des acteurs susceptibles d’y opérer, mais surtout rechercher la complémentarité des offres et leur intégration dans un bouquet de solutions, seul susceptible de concurrencer la voiture en solo.

A ce titre, il nous semble que le modèle coopératif développé entre autres par le réseau Citiz, qui propose aujourd’hui plus de 1200 véhicules partagés par 40’000 utilisateurs dans 100 villes en France, présente plusieurs avantages pour les collectivités. Ses sociétés ancrées localement, avec une gouvernance partenariale et démocratique associant usagers et partenaires, où la finalité est davantage la recherche du bien commun que la lucrativité ou l’effet d’image, semblent être la meilleure garantie d’un service d’autopartage adapté aux besoins tant des collectivités que des citoyens.