Interrogé par Ouest France, François Delétraz, président de la Fnaut, revient sur le communiqué de presse relatif au nombre considérable de sites SNCF et nous explique pourquoi.
D’après l’association d’usagers de transports Fnaut, la SNCF compte pas moins de 23 sites Internet différents et 7 applications distinctes. Une profusion de plateformes qui nuirait à l’expérience client.
Avec 12,5 millions de mètres carrés de bâtiments sur le territoire, la SNCF est le deuxième plus grand propriétaire foncier de France derrière l’État. Mais ce patrimoine immobilier considérable n’est rien à côté de son patrimoine numérique ! Selon un comptage de la Fnaut (Fédération nationale des associations d’usagers de transports), la compagnie ferroviaire dispose de pas moins de 23 sites internet et sept applications ! Une multitude que déplore l’association, dans la mesure où elle engendrerait une « complexification du parcours client ».
Dans le détail, parmi les sites dénombrés, 12 sont ceux de chacune des régions où la SNCF fait rouler des TER (Train express régional). Ils permettent tous la même chose : informer sur les horaires des trains, le trafic en temps réel, les prix des billets, les cartes de réduction… Mais chacun pour leur région respective. Que chaque région dispose de son propre site peut s’expliquer par la liberté tarifaire qui leur a été accordée pour les TER en 2016. Mais pour le président de la Fnaut François Delétraz :
il est invraisemblable qu’elles ne se soient pas mises d’accord pour avoir un site commun
De nombreux sites satellites
En réalité, il existe bien un site qui permet de répondre à la plupart des besoins des voyageurs, aussi bien pour leurs voyages en TER que TGV ou Intercités. SNCF Connect, qui est peut-être le plus connu de ces 23 sites car celui utilisé le plus communément. Il s’agit simplement de la plateforme de réservation, ou agence de voyages de la SNCF, qui dispose également de sa propre application pour mobile. Pourtant, il existe encore d’autres sites satellites que la Fnaut déplore.
C’est le cas de « Ouigo » et de son application, qui permettent d’acheter des billets low-cost alors que SNCF Connect permet d’en faire autant. Mais aussi de « SNCF Voyageurs ». Ce site est celui de la filiale de la SNCF directement en charge du transport de voyageurs. C’est d’elle par exemple que dépendent les guichets en gare, ou le 36 35, le numéro permettant entre autres d’acheter un billet par téléphone.
François Delétraz note que lorsqu’on achète un billet via un de ces biais, il n’est pas automatiquement renseigné dans l’application SNCF Connect.
Il faut que vous le remontiez manuellement, avec votre numéro de commande. Il serait tout de même plus simple de tout centraliser sur un même site
estime le président de la Fnaut. Dans le même registre, les abonnés MAX (Actif, Senior, ou Jeune) peuvent réserver leur billet sur Connect, mais doivent se connecter sur une autre plateforme pour valider leurs trajets…
Le cas à part de SNCF Gares & Connexions
D’autres sites relevés par la Fnaut sont encore moins connus du grand public. Certains, comme Groupe SNCF ou SNCF Réseau sont davantage institutionnels et ne s’adressent pas forcément au voyageur. Mais d’autres sont tout aussi occultes alors qu’ils comportent des fonctions pouvant lui être utiles. C’est le cas de SNCF Gares & Connexions, et son application associée MaGareSNCF. Ils permettent notamment de trouver les services disponibles dans toutes les gares, ou encore d’effectuer une déclaration de perte d’objet.
En ce qui concerne SNCF Gares & Connexions, François Delétraz de la Fnaut remarque que son détachement des sites liés à SNCF Voyageurs répond à une obligation légale.
Même si elles sont exploitées par la SNCF, les gares sont communes à tous les opérateurs ferroviaires. Donc également à des compagnies comme Trenitalia ou la Renfe qui sont arrivées en France avec l’ouverture du rail à la concurrence
Toujours est-il que selon lui, « en France nous sommes dans une situation insensée où la SNCF a multiplié les sites et applications ». Il relève encore l’existence de Toutoui SNCF (un chatbot en ligne qui permet une assistance instantanée), de TGV Inoui, Transilien SNCF, ou encore de la Médiatrice SNCF qui peut être saisie en cas de litige. Pourquoi autant d’URL pour des sites qui pourraient être hébergés sur une même plateforme ?
Éviter que le parcours client soit « un véritable labyrinthe »
Pour François Delétraz, cela peut être lié à la structure même de l’entreprise SNCF, divisée en de nombreuses filiales et avec des services qui ne communiquent pas toujours parfaitement entre eux.
Il y a parfois des querelles de chapelle à la SNCF. Le numérique dépend d’un service, la vente d’un autre, les guichets en gare d’encore un autre… À chaque fois qu’elle constate une carence quelque part, la SNCF crée un nouveau site
résume-t-il. Engagée pour la simplification des usages pour le consommateur, la Fnaut a rédigé une Convention de l’usager comportant 23 exigences. La cinquième d’entre elles stipule que le voyageur doit « disposer d’une information claire et concise ». Mais cette exigence « est percutée par la multitude de sites internet que propose la SNCF », regrette l’association.
C’est la raison pour laquelle elle demande une fusion d’un maximum de ces sites et applications. De manière à ce que
le parcours client ne soit pas un véritable labyrinthe, qui pousse les usagers à utiliser leur voiture plutôt que le train
, écrit-elle dans son communiqué. Pour son président, l’enjeu est de taille.
Pour qu’il y ait un report modal d’un transport à un autre, il faut de l’offre et des prix compétitifs. Mais aussi et surtout de la simplicité d’usage !
Article du journal Ouest France, par Arthur Quentin