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Les bus parisiens, ralentis par la politique du « tout-vélo » de la Ville (Le Monde)

09 Jan 2025

La circulation des bus parisiens a été trop longtemps délaissée, notamment au profit des cyclistes, admet la Mairie de Paris.

Dites à un Parisien que vous prenez le bus tous les matins pour aller travailler, il vous regardera avec de grands yeux éberlués. Dans la capitale, les bus sont quasi unanimement considérés comme le moyen de transport le moins fiable qui existe. Ils ont pourtant été rénovés récemment, roulent presque tous à l’électricité ou au biométhane, sont climatisés, moins chers que le métro depuis l’entrée en vigueur de la réforme des tarifs des transports d’Ile-de-France, et ils constituent le seul réseau entièrement accessible aux personnes à mobilité réduite. Les bus auraient donc tout pour plaire… si seulement ils avançaient.

Selon des chiffres communiqués à la fin d’octobre 2024 par la RATP, les bus parisiens roulaient en moyenne en heure de pointe à 8,85 kilomètres par heure (km/h) en mars 2024 contre 9,54 km/h en janvier 2022 et 15 km/h en 2000. Une vitesse moyenne désormais très en deçà de celle du métro (25 km/h), mais pas si loin de celle de la marche à pied (de 4 à 6 km/h pour les plus rapides). En 2021, l’Association des usagers des transports (AUT) d’Ile-de- France avait dressé ses propres statistiques et estimait en outre que les autobus passaient 39 % du temps à l’arrêt, soit pour respecter les feux de circulation, soit du fait de difficultés de circulation.

En conséquence, rien d’étonnant à ce que la fréquentation des bus ait plongé de 29 % entre 2019 et 2023. La fuite des usagers a d’abord été imputée au manque de conducteurs, mais ce point s’est nettement amélioré depuis le début de l’année 2024 grâce au plan de recrutement de la RATP et le trafic de voyageurs est reparti à la hausse. En revanche, note la régie, « les pertes externes restent à un niveau élevé », c’est-à-dire les ralentissements pour cause d’embouteillage, de déviation et d’aménagements de voiries ayant parfois trop donné la priorité au vélo.

« Le principal facteur de la baisse de la vitesse des bus est que la Ville de Paris n’estime pas qu’ils doivent être un mode de transport prioritaire. Elle a trop regardé certains modes et pas d’autres et, dans les choix d’aménagement, les bus ont été insuffisamment pris en compte », déplore Grégoire de Lasteyrie, vice-président (Horizons) de l’autorité régionale des transports Ile-de-France Mobilités (IDFM) et vice-président de la région Ile-de- France chargé des transports. Un constat partagé par Michel Babut, vice-président de l’AUT, qui estime que, pendant longtemps, la Ville de Paris « agissait surtout pour les vélos » et que « les bus n’étaient pas un sujet qui l’intéressait ». Adjoint chargé des transports à la Mairie de Paris, l’écologiste David Belliard n’est, bien sûr, pas aussi catégorique, mais reconnaît, et regrette, que « le bus a pu apparaître comme une variable d’ajustement » dans les aménagements de voirie et qu’un « rééquilibrage » est nécessaire. « La question du vélo réorganise l’espace public et rebat les cartes. Nous sommes dans un processus apprenant », défend l’élu du 11e arrondissement.

Selon les données publiques de la Ville, 80 % des couloirs de bus sont partagés avec les vélos, ce qui est à la fois dangereux pour les cyclistes et un facteur de ralentissement pour les véhicules qui, souvent, ne peuvent pas dépasser les deuxroues. De plus, les bus sont régulièrement encalminés dans des carrefours à cause de voitures qui s’engagent (illégalement) sans souci de bloquer l’intersection et de vélos (légalement) prioritaires sur les autres véhicules. Enfin, la politique municipale de réduction de la place de la voiture a certes permis de faire baisser le nombre de véhicules motorisés de particuliers, mais elle a aussi conduit à un report du reste sur les grands axes de circulation, où roulent les bus.

« Superpriorité »

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Article paru dans Le Monde, rédigé par