La concurrence, une obligation récente pour le TER, déjà pratiquée dans le transport public
La délégation de la gestion d’un service public du transport à une entreprise privée existe depuis longtemps en France pour les réseaux urbains, ou des lignes de car, le tout dans le respect du « service public ».
La concurrence dans l’exploitation des services financés par une autorité publique est une obligation décidée au niveau européen, applicable à partir de décembre 2023.
Sur les dessertes régionales elle est en usage à large échelle dans plusieurs pays européens, avec, quand elle est bien conduite, des résultats en terme de coût et de développement du service, y compris par l’opérateur historique, comme en Allemagne. L’arrivée prochaine de la concurrence a déjà eu des résultats positifs sur l’exploitation par la SNCF dans plusieurs régions françaises, dont en Pays de la Loire.
La concurrence peut être une plus ou moins bonne solution en fonction du type de contrat et du contexte. La pandémie rend incertaine actuellement l’évaluation des recettes futures et pourrait conduire des candidats à ne pas soumissionner ou à prendre beaucoup de marges.
La Fnaut PL attend de la mise en concurrence plus de trains et un meilleur service, ce qui dépend aussi de l’infrastructure. Elle note que la Région, pour arriver à l’objectif de cadencement horaire, qui permet un basculement de nombreux automobilistes vers le rail, devra cependant « remettre au pot ». Les gains financiers liés à la concurrence ne devraient permettre que quelques trains en plus, loin de l’objectif, mais devraient enclencher une croissance de la fréquentation.
La Fnaut n’a pas à donner d’avis sur la gestion du personnel, qui doit garantir la sécurité des circulations et les bonnes relations entre opérateurs et usagers ; cela passe par des conditions sociales satisfaisantes, écartant des sous-traitances systématiques.
Quels risques et contraintes pour une exploitation déléguée et régulée?
Prioriser l’exploitation des relations rentables
L’opérateur, qui reçoit les recettes, pourrait développer les services sur les lignes à fort potentiel et délaisser les autres. La Région doit donc être vigilante aussi sur une égale qualité de service sur tous les axes.
Gagner en productivité au détriment des services et de certains usagers
En Pays de la Loire, l’amélioration de la productivité a certes permis d’ajouter des trains, mais a été aussi obtenue par la suppression de nombreux guichets, sans que des alternatives soient disponibles. Cela écarte du transport public des voyageurs. La Région doit veiller à ce que tous les publics aient accès au TC, ce qui demande en particulier d’écarter les solutions « tout numérique ». L’information, la billetique, les réclamations doivent être accessibles à tous.
Retarder ou empêcher des évolutions nécessaires à l’amélioration du service
L’allotissement de première phase (lignes au Sud de la Loire essentiellement) touche les étoiles ferroviaires de Nantes et d’Angers. Des liaisons diamétrales espérées dans le cadre de « Services Express Métropolitains » n’y seraient pas possibles (sauf des liaisons comme Savenay Nantes Ancenis ou Ancenis Angers Sablé, non concernées par la première mise en concurrence).
Nantes Châteaubriant Rennes : toute évolution de cet itinéraire bis risque d’être bloquée par une délégation de service qui porterait de plus ici aussi sur l’infrastructure. Cet axe ne doit pas accueillir uniquement des dessertes banlieue, mais doit permettre aussi une liaison continue de la périphérie de Nantes à Rennes, pour permettre des relations de proximité.
La Roche sur Yon la Rochelle : le contrat de délégation portant sur 10 ans devrait intégrer les travaux de la deuxième voie et des projets non encore connus d’amélioration de la desserte Nantes la Rochelle : ces étapes et l’intégration de nouveaux arrêts ne pourront pas être définies avant 2022, (étude en cours), Ne faut-il pas retarder ou revoir la délégation de service, les recettes et les contraintes supportées par l’opérateur restant très difficiles à apprécier ?
La Région doit réguler les opérateurs et leurs relations avec les usagers
Quelque soit l’opérateur, les usagers demandent à disposer sur le territoire régional, des mêmes prestations et de la même attention. Ce n’est pas aux usagers de s’adapter aux différents opérateurs. La Région, autorité organisatrice, a donc un rôle plus important que lorsqu’il y a un seul opérateur :
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Définition du service contractuel par axe, en vue d’approcher les objectifs fixés de cadencement horaire. Libre à l’opérateur de dépasser ce service contractuel.
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Définition des tarifs usagers au niveau régional. Un seul titre de transport interopérable doit permettre l’accès aux différentes prestations de transport, quelque soit l’opérateur, le mode de transport et le trajet, ou les trajets enchaînés.
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Garantie d’une même information et accès aux billets, quelque soit l’opérateur. L’achat, l’échange, le remboursement de trajets doivent être possibles en mode numérique ou physique, sur des lieux répartis sur la Région, avec des horaires minima définis. Une gestion par la Région des distributeurs de billets, permettrait d’utiliser des appareils standards et d’en implanter dans des gares plus nombreuses et dans des lieux extérieurs.
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Suivi des relations entre opérateurs qui concernent les usagers : billets combinés, règlement des litiges, correspondances, etc…
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Regroupement et traitement des données de l’activité et des opérateurs, pour pouvoir les restituer auprès des élus, des habitants et usagers.
La participation des usagers est nécessaire pour l’amélioration des services. Les usagers demandent à participer à la rédaction du cahier des charges qui va servir à sélectionner les opérateurs et au contrôle de l’action des opérateurs, qui doivent fournir les principaux éléments de leur activité, lors des Comités de Lignes et par diffusion d’un rapport annuel.
17 Fév. 2021