Des leçons à tirer du Grand Est
Fin novembre, la FNAUT a tenu son congrès bisannuel à Mulhouse, sur le thème des relations transfrontalières, particulièrement dynamiques avec le Luxembourg, l’Allemagne et la Suisse, qu’il s’agisse d’infrastructure, d’offre de trains ou de billetterie. La Région Grand Est (GE) avoue avoir plus de difficulté avec les régions voisines ! Ce qui ne nous étonne pas en Pays de la Loire, où plusieurs dossiers avec la Nouvelle Aquitaine ou la Bretagne, sont bloqués ou font du sur-place, alors que l’espoir est encore ouvert pour l’amélioration de la desserte Caen-le Mans-Tours
Cette attention au ferroviaire concerne aussi les SERM/RER. GE avance avec les collectivités locales, sans conditionner son engagement à un apport de l’État. L’offre de 5h à 22h autour de Strasbourg, après un démarrage loupé, continue de croître, avec cofinancement Région / Métropole. Fin 2024, ont été encore injectées près de 10 circulations par jour, après un gros effort en 2023. La fréquentation suit (+15 %/an). La Région a aussi décidé d’une redevance Poids Lourds sur autoroute, pour aider à réorienter les mobilités.
Une ambition pour les Intercités
Les TET (Trains d’Equilibre du Territoire) sont assurés actuellement par les « Intercités » de la SNCF. L’État a lancé un appel d’offres, auquel SNCF-Voyageurs est candidate, et devrait désigner un exploitant début 2025 pour les lignes de l’Ouest.
Source : Appel d’Offres DGITM
L’amélioration de l’offre (passage de 2 à 3 allers-retours par jour pour Nantes-Lyon, de 3 à 4 pour Nantes-Bordeaux) a fait bondir la fréquentation : respectivement +63 % et +90 % par rapport à 2019, démontrant l’importance de la demande. Celle-ci est maintenant limitée par le parc roulant, seulement 15 rames entretenues à Nantes, au centre du « Grand Blottereau ».
Répondant à la demande, une commande de ces rames bi-mode (électriques et thermiques, et à un niveau) soutiendrait l’usine alsacienne qui, autrement, pourrait être contrainte de fermer prochainement sa chaîne de fabrication.
C entre de maintenance du Grand Blottereau à Nantes
A gauche une rame Coradia Liner (près de 300 places) cousine « grand parcours » des rames Regiolis de la Région.
La SNCF indique qu’elle ne peut entretenir plus de rames sur le site actuel, où un centre de maintenance dédié aux TET est prévu, en plus des ateliers pour les TER. La Région y programme déjà sur 4,3 ha le centre de maintenance du lot TER Sud-Loire, attribué à la filiale Loire Océan de la SNCF, qui aurait été mieux situé en Sud-Loire. L’État se préoccupe-t-il de développer les liaisons TET, et de gérer les terrains raccordés utiles à leur développement et aux autres lots TER ? Un comité de pilotage avec la Région, la DGITM (Direction Générale des Infrastructures, du Transport et de la Mer, pilote des TET) et SNCF Réseau se réunirait.
L’État a beaucoup réduit le nombre de liaisons TET, en les transférant aux Régions, qui, dans un contexte financier contraint, n’ont généralement pas amélioré ces dessertes (exemple de Caen-le Mans-Tours). On note donc avec intérêt que l’appel d’offres inclue l’option d’une nouvelle liaison TET Nantes-Lille par la Normandie, justifiée logiquement par son trafic potentiel. Elle mettrait en relation les Pays de la Loire avec la Basse-Seine.
Au départ de Nantes, en plus des métropoles concernées, ces 3 lignes TET desserviraient une trentaine d’arrêts et de territoires, sans passer par Paris, et sans prendre la voiture.
L’Etat saisira-t-il cette opportunité de répondre à la fois à une forte demande, aux objectifs d’économie d’énergie et de réduction des gaz à effet de serre, de transfert modal, de soutien à l’industrie nationale ? Les 7 FNAUT régionales concernées par ces liaisons se sont à plusieurs reprises manifestées pour rappeler l’importance des enjeux et la nécessité de développer le programme TET.
Etude Nantes-St Gilles / Pornic et SERM
Entre 2022 et 2024, la fréquentation de ces lignes à voie unique a crû de plus de 20 %. Le renforcement de leur capacité est urgent. Signée en septembre avec SNCF-Réseau, l’étude implique aussi Nantes Métropole et analysera l’option d’une halte nécessaire dans l’île de Nantes. Mais les choix principaux, dont les haltes, seraient déjà arrêtés avant concertation, y compris avec l’ASLO rassemblant les collectivités concernées.
D oc SNCF-Réseau
La présentation fin novembre de la future halte « Bouguenais-aéroport » n’a pas abordé la desserte urbaine (via bus, vélos, piétons) essentielle pour la population vivant à proximité. La présentation du même travail pour la halte « île de Nantes » à Beaulieu, déjà desservie par les transports urbains, est toujours attendue. Cette halte est indispensable à la desserte de l’île et à la constitution d’un SERM (Service Express Régional Métropolitain) ambitieux.
Le lancement de l’étude SERM devrait démarrer dans le cadre du bassin de mobilité regroupant Nantes Métropole et 11 intercommunalités à la périphérie, mais devrait intégrer aussi Ancenis et St Nazaire. La concertation avec les associations et habitants (et non la seule information) est attendue.
Accroissement trop lent du parc roulant
La bonne fréquentation des TER a permis l’augmentation des recettes venant des usagers, démontrant ainsi que l’amélioration de l’offre, essentiellement aux heures creuses et le week-end, a aussi des résultats positifs pour le climat et les finances du secteur. Raison de plus pour continuer.
Mais l’amélioration de l’offre doit aussi se faire aux heures de pointe, ce qui passe par l’achat de nouveaux matériels. L’achat de 2 rames à forte capacité est une bonne nouvelle, mais très insuffisante, d’autant que pendant plusieurs années leur apport va être neutralisé par le passage en atelier de 17 rames pour un grand toilettage de mi-vie. Or les renforts supplémentaires n’arriveraient qu’après 2030, avec le lot « Etoile Mancelle ». Des solutions complémentaires seraient à mettre en œuvre, locations, achats d’occasion, etc..
Voitures partagées : quel impact ?
La Région Pays de la Loire, qui réduit son budget, maintiendrait l’essentiel de sa stratégie de mobilité pour les TER. Seraient décidés :
Le gel de l’extension des programmes de Transport à la Demande (TAD). La Région voudrait accroître le bas taux de remplissage des véhicules.
L’arrêt des subventions au covoiturage courte distance, après 4 années d’aides. Les nouveaux covoitureurs, qui y avaient été sensibles, vont-ils continuer leur pratique ? Le Gouvernement pourrait aussi réduire ses aides, du fait d’économies d’énergie inférieures à celles attendues,
Ces modes de transport étaient promus par les Contrats Opérationnels de Mobilité signés entre les intercommunalités et la Région. L’autopartage en boucle est par contre rarement envisagé, alors qu’il renforce l’utilisation des autres modes (dont transport collectif et vélo) et soulage le budget des ménages, en évitant l’achat d’un véhicule.
Le « Pôle Métropolitain Mobilité le Mans Sarthe » avec son offre en croissance « Mouv’nGo » prouve que cela répond à un besoin dans la vingtaine de communes rurales qui le subventionnent, alors que l’autopartage est surtout présent dans les centres denses des grandes villes, mais dans un cadre commercial classique.
Image : www.mouvngo.com
L’autopartage, un nouveau service public de la mobilité ? Mais le constat est aussi que les usages partagés de la voiture en zone peu dense et hors axes fréquentés ne sont pas à la portée de tous et ont un coût significatif pour les collectivités. Sur de nombreux axes, le développement de lignes régulières de cars, accessibles à tous et d’usage prévisible, devrait être relancé.
Coup de frein sur l’intermodalité
Limitant le recours à la voiture et l’emport des vélos dans les trains, des Vélos en Libre Service (VLS) étaient prévus dans 30 gares avec l’aide de la Région. L’opération est
bloquée, alors que plusieurs intercommunalités étaient volontaires. Une offre unifiée serait pourtant utile, intégrée dans les titres de transport sur support unique, toujours attendu.